Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
11 novembre 2011 5 11 /11 /novembre /2011 11:11

Nora est la perle du Palais Goyave. Sordide expression de la consommation charnelle, une perle est une vulve, trop rarement l'oiseau blessé qui sait se faire oublier...

 

 

I PALAIS GOYAVE

 

Sur le fil d'un rasoir tendu jusqu'aux débâcles physiques, Nora avait appris à se tenir, quasi stoïque, en dodelinant son corps de soyeuses prétentions. Jarretelles et corsages esthétiques, une rue ouvragée de mille délicieuses vitrines, elle superbement digne de la plus lumineuse d'entre-toutes : Palais Goyave, une couche satinée flamboyante laissait son corps jouer de distractives positions, quand à son visage, une perle pâle offerte aux bouches tremblantes de la gente masculine qui venait se tordre en de singulières poses devant la vitrine astiquée de Nora.
Ses grands yeux fauves tenaient à distance les plus tendres prétendants à sa clientèle, composée des plus redoutables et fournis marchands et financiers en station dans le centre d'affaire de la ville, situé non loin du quartier des dames de plaisir.

 

Nora jouissait d'une vue panoramique sur la grande rue, où traînaient, perdues, faibles, malades, grasses et boudinées dans des vinyles usés, ses consœurs de la bonne quête. Une dose de méthadone parfois suffisait à les entraîner en de multiples passes, à l'arrière des containers stationnés dans les ruelles adjacentes, et sans plus de confort que de protection, les filles terminaient leur course, effondrées et laides, leur peau ouvertes de furoncles ignobles, dans les rigoles, ramassées au matin par les services d'hygiène mis en place une décennie plus tôt par les bons soins d'une course à la mairie.

 

La politique est une pute frileuse, pensait Nora, elle préfère autant que moi le confort aguichant d'une belle couche de satin, et soutirer de sa vue les reliques putrescentes de ses repas.

Un matin, ce fut Crysta, la douce et douloureuse Togolaise, qui partit ainsi, fauchée par une maladie respiratoire subite, juste sous les yeux, froidement rivés aux siens, de Nora.
Aurait-elle au moins eu la décence d'aller se crever sous un buisson, comme l'avait fait en son temps la petite asiatique, que chacun, ici, nommait cyniquement Hirondelle ? Un nid d'oisillons crevés, voilà ce qui restait de la gamine, après qu'elle eut la désobligeance de passer en douce sans capote pour engranger d'avantage dans le dos des comptables du salon. Les dépistages, sans appel, la mirent à l'ordre des choses, et Hiro, seule et sans ressource, tint à peine trois semaines avant qu'on ne la découvre, plus de trois jours après son dernier souffle, à l'extrémité ouest du Parc des Fanges, puisqu'ici, tout le monde semblait avoir oublié qu'il avait pour nom de baptême Parc des Gloriettes.
Un bosquet de deutzia, en pleine floraison, avait masqué l'odeur putride du cadavre, et lorsque le service d'hygiène sorti le corps, il était raide et gris, et dans les cheveux longs et noirs et lisses, des centaines de fleurs rosées s'étaient fondues.

Nora voyait ainsi les putes classées : celles qui prenaient des risques, et avaient la décence d'aller crever au loin des regards, comme Hiro. Elles étaient peu nombreuses. Elles étaient des oiseaux pris dans les pâles des éoliennes, qui tombaient, blessés, et trouvaient encore l'honneur de ne pas se laisser voir à l'agonie. Celles qui n'avaient aucune décence, jouant à la roulette cent fois par jour, crevées d'une irrésistible envie de crever, et qui s'affichaient, souriantes et fissurées, jusqu'à venir expier un dernier râle sous les arcades lustrées, étaient des vulves mortelles, de grandes et insatiables vulves malades pourvues de corps de femmes, ainsi que la Togolaise, encore presque prise d'un sexe tandis qu'elle crachait ses flaques de poumons saignants.
Enfin, il y avait les perles, Nora et quelques autres, doucereusement posées en écrin, dans l'attente d'un collier digne de les recevoir, et qui ne mouraient pas.

II HERR FRIDERT

Herr Fridert passait justement la grande porte ornée de lustres dorés du Palais Goyave. Une escouade de sœurs aux mains douces et manucurées l'accueillir, prenant le temps d'un tourbillon de parfums légèrement suaves, manteau, écharpe et coiffe, l'installant en douceur, mais tout aussi promptement, dans le fauteuil central du hall tapissé de tissus délicats et orné de verreries finement ouvragées.
Herr Fridert commandait régulièrement pour ses sorties quelque fille cultivée et Nora était dans ses grâces habituelles.

Aussitôt l'homme assis, la jambe droite croisée au-dessus de la gauche, ses grandes mains blanches en évidence, ouvertes sur les accoudoirs, laissant tout loisir d'observer, à l'annulaire droit, une lourde chevalière marquée de ses initiales, J .F., croisées en tortillons serpentaires, les bras de manche judicieusement taillés au-dessus d'un puissant bracelet de montre luxueuse, les filles, parées, se présentèrent en défilé silencieux et souriant, Nora en tête.
Jans Fridert ne lui offrit pas un regard.
Il reparti, quatre minutes plus tard, aux bras de Lyne, une jeune et talentueuse débutante, tandis que les femmes reprenaient leurs positions gracieuses sur les couches satinées de la grande rue.

Nora ressentit alors quelque chose d'un pincement délirant au fond de sa poitrine, réprimé sitôt, mais dont le souvenir la tint éveillée plus de deux heures après celle qui lui offrait en général le sommeil.
Tandis que la rue se bardait de soleil chaud, relevant les pavés de couleurs multiples, que les filles du dehors s'alourdissaient de sommeil dans les coins d'ombre, cherchant encore à aguicher les rares clients de ces heures lourdes, Nora veillait, demi assoupie seulement, s'empêchant au mieux de passer rapidement l'incongru picotement qui l'avait pris lorsque Jans était parti un bras sous la mince taille de Lyne, radieuse de se trouver à son goût.
Ignoble petite fille gâtée ! Pensa la déboutée, ignorant jusque-là le sentiment de jalousie.
Vilaine petite pute parâtre, que pensera Herr Fridert lorsque tu ouvriras tes jolies petites lèvres trop fines, laissant échapper, dans ton filet de voix trop doux, l'immense infortunée culture que tu as oublié d'emporter dans ton corps de fillette trop fluet pour tenir même face à la brise ?

Elle pensait, profondément, d'autres termes bien moins raffinés, au sujet de Lyne, mais n'osait même les penser clairement en toutes lettres. Nora était le raffinement né, et ainsi raffinée, ne pouvait simplement pas envisager de pareils mots en clair. Ils étaient, pour ainsi dire, laissés en codes obscures et grisés.
Lyne revint, radieuse, offerte d'un superbe manteau de renards blancs, dans le bras toujours aussi fermement tenu à sa taille de Jans, qui semblait ravi de la soirée longuement rallongée en sa compagnie.
Nora, fiévreuse dans son demi-sommeil, fût absolument réveillée par le rire cristallin de la jeune femme, dont la claire jeunesse l'irrita au plus haut point.

Cela ne se pouvait pas, pensa-t-elle. Non, il était inconcevable que cette catin frivole et inexpérimentée plaise à un client aussi fermement maniéré que l'était Jans Fridert.
Inconcevable, donc, que Jans la préfère à elle-même... il devait s'agir plutôt, de la part du Herr, d'une forme de punition machiavélique sur la personne de Nora.
Nora échafaudait alors, son esprit fatigué, les raisons de cette punition. Avait-elle eu un mot de trop ? Une pensée à taire permise lors d'un égarement ? Un comportement maladroit ? Une pose vulgaire à un quelconque moment de leurs ébats ? S'agissait-t-il d'un verre consommé de plus, qui aurait donné à croire à Jans qu'elle n'était jusque-là que parvenue à se retenir, et que l'habitude et la confiance aidant, la trouvait soudain en proie à un démon méticuleusement caché auparavant ?

III LYNE

Le soir arrivait, Nora, ses poses moins empruntes de l'énergie habituellement sensuelle qu'elle leur donnait, repris son poste dans la vitrine. En contrebas, encore visible à ses grands yeux fauves moins brillants que d'ordinaire, une bagarre éclata soudain un groupe de putains en deux clans déchirés. Au centre, une fille s'affaissa, prise de convulsions violentes, un groupe de clients pris tranquillement le large, les putes se dispersèrent en faisant de grands mouvements d'épaules et de bras, et une camionnette arriva en silence pour récupérer la chose désormais inerte, éviscérée sans doute au vue du flot de tripes qui se déversaient du corps soulevé sur un brancard crasse.

Un autre client pénétra alors le Palais Goyave. Rudolphe Kymher, accompagné de relations d'affaire
richement vêtus, lui aussi souvent confié aux charmes de Nora. Nouvel empressement parfumé, nouveau défilé délicat, Nora en tête, pas toute à son affaire certainement, passa à nouveau hors-choix, et Lyne, radieuse et couverte de ses queues de renards immaculées, repartie accompagnée de deux compagnes, aux bras des trois hommes fiers.

Picotement durable cette fois, Nora s'en retournant troublées, peinant à respirer profondément pour récupérer son flegme habituel.
La camionnette avait disparu, magie de la rue des délices, et ses pavés, nettoyés, rutilaient de vinyles à bourrelets, de filles maigres et herpétiques, de sourires sombres à vous faire pleurer le sexe de longues douleurs syphilitiques.
Rien ne s'était passé.

Lyne était un oiseau dans les pâles. Non. Lyne était une vulve ignoble. Nora étant une perle, la seule peut-être de tout le quartier, Lyne ne pouvait être qu'un immondice vulgaire, crachant ses tripes et ses dents et ses alvéoles pulmonaires et se vidant par tous les trous, centaines de trous sûrement provoqués par autant de crevasses dégoûtantes et de coups de lames d'acier, Lyne n'était pas une vulve, mais la vulve de toutes les vulves immondes qui se crevaient en plein jour, des milliers de queues encore plantées dans ses milliers de crevasses sombres.
Nora était la seule perle.
Un rêve délirant de fièvre prenant le corps épuisé de la perle, tandis qu'elle sombrait en un cauchemardesque fantasme, Lyne enfin découverte, jetée au trottoir, montrant son sexe aux lèvres coulantes et béantes, affichant son vagin sous la vitrine pure de Nora, sous les yeux fauves si purs de Nora la perle, et crevant soudain telle une boule de pu immense.

Lyne et ses compagnes revinrent aux alentours de six heure du matin, joyeuses et fatiguées. En montant à l'étage pour rejoindre leurs chambres, elles passèrent devant Nora, prostrée dans le fauteuil central du hall, les yeux brillants de température.
Tu n'as pas l'air dans ton assiette, chérie, exclama la voix douce de Lyne. Tu ferais mieux d'aller te coucher quelques heures, désires-tu que je t'apporte  un thé chaud ?
Nora, alors, se leva brusquement du fauteuil, griffes et gorge déployées, dans un cri absolument inhumain, pour se jeter sur la frêle jeune fille. Crève pétasse ! Hurla-t-elle. Les deux compagnes, saisies, mirent quelques secondes avant de réagir. L'une hurlant : Au secours, Nora à pété les plombs, à l'aide, d'une voix stridente d'écolière effrayée, l'autre, plus âgée, attrapant l'agressive femelle par les talons, la forçant ainsi à rompre son élan dans une chute grotesque qui la conduit sur le carrelage blanc et froid, son corps tendu tombant comme un bois sec, rompue aux sanglots névrotiques de la prise de conscience soudaine de sa folie.

IV PERLE

Une perle, qui cherche une perle pour son plus beau collier, une perle, je suis une perle, n'aller pas aux putes, messieurs, prenez des perles, enfilez-les sur vos queues pour tromper l'ennui, c'est brillant et précieux, les perles, venez aux perles et pas aux putes, messieurs, je suis une perle...
Nora, deux semaines après le dramatique incident qui la conduisit, séance tenante, en cellule capitonnée, trouvait le Palais Goyave fermé à ses charmes. Son regard, gavé de drogues fantastiquement calmantes, avait perdu toute clarté, ses gestes, désordonnés, lui donnait des allures de pantin débile dont il aurait manqué un fil ou deux par saccades convulsives.
Nora la perle était une vulve.
Lorsqu'elle convulsa, bave aux lèvres gercées, d'une dose trop richement colorée, c'était sous la vitrine de Lyne, la plus grande, la centrale du Palais Goyave.
Lyne pensait qu'il n'y avait que deux sortes de putes. Celles qui n'étaient pas encore sur la rue centrale. Et celles qui y étaient déjà.Et dans son cerveau capable de semblable raisonnement binaire, elle observait, avec mélancolie, les fluides de Nora la perle s'écoulant lentement sur les pavés humides de l'automne qui tissait de longues brumes le long des bâtisses aux vitrines chaudement colorées.
La camionnette, silencieuse, venait par là.
Partager cet article
Repost0
8 novembre 2011 2 08 /11 /novembre /2011 13:29

 

Elle est un oiseau ouvrant larges rémiges

Pour porter les gorges trompées

Et dans les brises glacées des hauteurs

Privée d'air

Elle nous retombe, brisée

 

Inspiration, quand elle nait des rêves

Puisée aux sanglots

Ses puissants muscles prompts à l'envol

Est un oiseau fragile

Engoncé dans ses incertitudes

 

Les rêves sont de sordides plumes

Naissant au jour et fondant au soleil

Entraînant ceux qui s'y crochent

Aux vulgaires précipices déjà cent fois nommés

 

Mais ils s'y trainent toujours

Les créateurs d'apocalypse

Tombés déjà, tournoyant au dessus

Toujours

Et leurs rêves sont béants

De larges trous cousus de précieuses parures

Du vent pour les puissant, gonflant de grandes voiles

Du sang à boire aux écorchés, qu'ils ne cessent de vivre

Tous sont ivres

Des rêves qui font si triste inspiration.

 

Elle est un oiseau rêche, qui ne chante pas souvent

Inspiration puisée aux éclats de la raison

Son rire pourtant se contente en lui-même

Et son cœur est une pierre qui jamais ne se rompt

 

Peut-être ne vole-t-il pas les splendides hauteurs

Sous les regards hautains d'autres oiseaux moqueurs

Quand il va se poser, les rêves brisés plus loin

Il peut encore voler, suffisant à son poids

Partager cet article
Repost0
22 octobre 2011 6 22 /10 /octobre /2011 23:20

Jouons de nos longs doigts Quelques notes sinistres Sur nos claviers de bois Une mélodie triste Laissons-nous à l'espoir De n'être illusoires D'écrire notre histoire Nous spectres sans mémoire Quelques notes plus douces Pour croire en si demain Sous nos paumes que l'on pousse À se joindre un matin Homme que tes nuit sont longues Et tes sourires éteints Je les ferai plus longues Si mon corps t'étreint J'irai à ta rescousse Mon ombre pas-à-pas Apaisant tes secousses Et calmant tes combat Homme que tes nuits sont froides Tes étoiles si loin J'éteindrai les cascades Qui noient tes lendemains Je donnerai ton nom Aux oiseaux migrateurs Qui survolent les hauteurs Portés par ma chanson Homme tu n'as pas d'odeur Posé dans ton écrin Posé entre mes reins Ton âme est sans saveur J'ai perdu ton chemin Posé ton corps en croix Échappée de mes mains  Ma tendresse sans toi Je voyais tes splendeurs Tes soleils si certains D'être à chaque marin Un souffle de chaleur Homme tes nuits sont maudites Tes paroles sordides Ont glissés sur mes ailes Je suis une hirondelle Homme tes nuits génocides Je les prendrai à bras Je sonnerai le glas De tes tendres suicides Quelques notes plus douces Pour croire qu'un lendemain Qu'un soleil que je pousse Tiendra entre tes mains Nous jouerons de nos doigts Quelques mélodies tendres Nous chasserons les cendres De tes chants de forçat Quelques notes plus douces Un rire pour croire enfin Que nos frères sont tous Dignes du même chemin

Partager cet article
Repost0
13 octobre 2011 4 13 /10 /octobre /2011 15:52

Eau

 

 

Je suis en chaque pluie la vapeur sourde venue d'ailleurs

Et m'éparpille au gré des airs au gré des terres et des tourments

Passant ma vie à me défaire

À me refaire, toujours entière

 

Mie ma vie, toujours si pleine

De pleins soleils miraculeux

Qui me reviennent comme par erreur

Aux bouches sombres des canaux

 

Mie ma vie, que dois-je en faire

Moi qui si pleine connaît les cieux

Et suis passée mon âme en peine

Par les boyaux tous monstrueux

 

Si je n'ai plus d'autres soleils moi goutte d'eau moi pluie légère

Si j'ai causé tous les naufrages et réveillé leurs naufragés

Que puis-je en faire moi si ancienne

Quand on me sert sans plus me voir

 

Je suis la pluie et la rivière

L'or qu'on s'achète et sa misère

Prise sur terre et sans parole

Moi qu'on espère goutte qu'on vole

 

Je suis le fleuve qu'on enserre la mer enfin que l'on conquiert

Ses vagues riches et ses tempêtes je suis l'immense qui tant effraye

Je suis les fonds et ses mystères et les vertiges que l'on ignore

Mie ma vie que puis-je y faire si je suis source de ma vie ?

 

Mie ma vie que dois-je en faire

Moi goutte d'eau moi si légère

Si je ne peux pas m'en défaire

Mie ma vie est un enfer

 

Moi goutte d'eau et moi rivière

Moi fleuve enceint et mer prospère

Moi les cannaux et les mystère

Moi que l'on craint moi qu'on espère

 

LAZ

 

Partager cet article
Repost0
10 octobre 2011 1 10 /10 /octobre /2011 18:08

 

Il avait son visage

Éteint

Sans fin

Et de chaque horizon

Serpents

Si fins

Leurs langues

Glissantes

Jusqu'au sombres langages

Les yeux sont creux

Ils parlent de lui-même

Retiennent pris à l'os

L'image toute semblable

 

Un autre visage éteint

Reproduisant sans fin

Les orbites luisantes

Les os parfois cuisant

Les phares d'un toujours creux

Qui se cache vaniteux

 

Au plus profond de lui-même

Sa langue dit de même

Parle de toutes faces

Sous toujours la même face

 

"Jamais ne change

La guerre est en moi-même

Sous millions coups de pioche

Et même jusqu'à l'os

 

Inconscience maladive

D'être semblable au pire

De chercher l'avenir

Sous les peaux et les roches

 

Sifflent les bêtes sordides

Les longues décharnées

Ressacs et volontés

Des culpabilités

 

Il me faudrait fouiller

En dehors de mon crâne

Aimer la bête lisse

Qui sans cesse me glisse

Entre les doigts

 

Attraper mes phalanges

Les forcer à me rompre

Briser tout mon entier

Pour enfin me répondre

 

Je ne suis plus dehors

Qu'un spectre dépassé

Les autres qui sont morts

Je les ai délaissé

 

J'ai touché à mes doigts

Ma langue s'est perdue

J'ai fouillé devant moi

Pour me tirer dehors"

 

Il peint la guerre dehors

Son cœur est mort

Il cherche peut-être encore

Une porte sans ressort

 

 

Il peint la mort dedans

La guerre qui porte la mort

La mort qui peint la guerre

Et lui si froid qui dort

 

LAZ

 


Visage de la guerre : ici

 

 

Autre hors-piste sur le visage : là


Partager cet article
Repost0
9 octobre 2011 7 09 /10 /octobre /2011 22:44
L'hiver déroule sous mes carreaux
Nimbes chétives et feuilles libres
Pliant de force l'orgiaque rameau
Qui retenait les sèves en fièvre

L'hiver endort les tons braillards
En d'autres verres sa mine grise
Est la tristesse des sangs criards
Dans l'abandon de frêles mises

L'hiver emporte, emportera
Les résistances et les misères
En d'autres vers il est le glas
Des chants d'oiseaux et de nos terres

L'hiver s'enroule à mon balcon
Je me sens vivre, le froid m’enivre
Il donne le cœur à son pardon
En déroulant son corps de givre

 

L.A-Z

Partager cet article
Repost0
30 septembre 2011 5 30 /09 /septembre /2011 10:39

 

Mon cœur enfin confiant, ce sont des larmes claires

Une maison pleine d'enfants, sauvages, et qui tant s'aiment

Qu'ils ne sont pour les autres que rires et raisons

Tous aussi en lumière dans chacune maison

 

Alors je vais en paix, dans l'avenir si lourd

Qu'une poignée d'illusion retient à sa misère

Je pousserai les miens à croire en leur pardon

A croire en leur raison, la seule qui me parvienne

 

Et d'enfant en enfant, les autres dans leur guerre

Se demanderont un jour comment passer sur terre

Sans rompre et sans blesser la plus belle rencontre

Leur chair enfin au cœur de toutes les chansons

 

J'écrirai à nouveau, dans les cercles des cercles

De tant de beaux visages, de tant de grandes maisons

Qu'elles n'auront plus de portes, chacun pris en lui-même

Sans crainte et sans regret, aux autres pris de même

 

Il nous faut tant de gestes, tant de force et d'amour

Pour briser sans souffrir les chaînes d'illusion

Les mots lancés au même qu'ils frappent ou qu'ils rassurent

Enchaînés à nos monstres, ils ne peuvent plus y faire

 

Il nous faut tant de force, d'amour et de raison

Que les mots si ballants nous rendent défaillants

Chacun allant se faire dans l'exemple raison

Son cœur, si bien qu'absent, répondant chaque jour

 

« Je n'aurai plus de chaine, plus d'autres et sans maison

A chaque carrefour ce seront cent maisons

Cent lèvres et cent regards qui tous en direction

Trouveront à mes lèvres sourire et nul pardon »

 

 

Sourire et nul pardon.

 

L. A-Z

Partager cet article
Repost0
12 septembre 2011 1 12 /09 /septembre /2011 22:06

-.-

 

*

 

J'ai sillonné le ciel, les quais et les mirages

Écumé d'avantage les marchands de brouillard

Que trempé mes yeux au mazout des rivages

 

De mes jambes sont nées les ombres et les mers

Les tempêtes qui ragent et te laissent au hasard

De l'ivresse du large, et mes lèvres au désert

 

*

 

Quand juchée sur les vagues j'ai retenu ton souffle

Et les appels à l'aide des voiles en déroute

J'allais de phare en phare sans creuser d'autre route

 

Peut-être nénuphar, voguant de temps en temps

Sur de grandes misères, sur un grand océan

Entre marées déçues et promesses du vent

 

*

 

J'ai perché à tes mâts les absences, les doutes

Jeté tant de poussière à mon cœur et dans l'air

Sous les aubes et les cierges j'ai fait l'ombre à ma chair

 

Sous mes propres tempêtes j'ai poussé quelque part

Une île aux brise-vent pour rompre mes amarres

Pour fondre mes cents têtes au loin des moindres routes

 

*

 

Dans le soulèvement, le vent bat ma fenêtre

Je reviens de si loin, j'ai laissé à mes rêves

Les sables, les tourments, les rives et les repères

 

Je ne suis pas si morte, je ne suis pas perdue

Si les autres sont fortes, je ne suis pas pendue

 

Je ne suis pas si morte, à peine un peu déchue

Retenue à ta porte mon âme mise à nu

 

 

*

 

Je ne suis pas si morte, j'ai pris quelques envies

En jouant de la corde à ma gorge s’enivre

 

Je ne suis pas si morte, à cent lieues de la rive

En jouant de six cordes j'ai pris le temps d'en vivre

 

J'ai pris le temps d'en rire

 

*

 

 

 

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
23 août 2011 2 23 /08 /août /2011 17:39

Il est encor des hommes osant braver les fleurs
D'offrir dans une tempête le soulèvement des coeurs
En couchant par centaines des quatrains sans rondeurs
Comme autant de caresses sur des oiseaux voleurs

Ils sont de mises, et ces gens-là
Ne tiennent tête qu'à leurs promesses
Sur les parvis, les jours de fête
Ils lancent du lard aux grands poètes

Mais il en fût, il est encor
Et de rigueur, toujours à l'heure
Dont les escrocs paissent en pudeur
Sous les airs simples de ripailleurs

Il est encor des hommes qui ne paissent à pourpoint
D'un semblant de ferveur, l'âme en bouche le matin
Et qui tiennent leurs langues, et qui lavent leurs mains
Attendant à l'offrande un mot qui ne soit vain

...


Ainsi en chaque point, l'assise est de rigueur
Pour peser le mandrin il faut lui faire revanche
Et si de légèreté il s'estompe au matin
Abattons la potence, qu'elle ne se tienne pour rien

...

Je boirai à la clémence
Aux yeux de mon ange
Aux cieux, à la chance
Je boirai à l'absence
Je boirai à mes sens
Qui trompent mes misères
Et font de mes lanternes
Les plus vives lumières

...

J'aurai un jour
Je n'ai celui-ci
Qui me subvienne
De larges alentours
(Valent-ils le détour)
Une place seule convienne
Et l'ombre des vautours
Partout autours de soi

J'aurai les orées des bois
Les larges, les traverses
Du silence ou du roi

...


Sous le quatre angles
Le monde croule de splendeurs
Et la brume s'y coule
Douce
Sereine
Sans un bruit
La valse des rumeurs
S'est tue

...


J'ai touché des lueurs or

Longé les quais, assise aux sycomores

Et leurs panaches oranges

Sous des flammes pressantes

 

Les flammes d'un soleil mort

Qui s'allonge sur les ombres et s'endort

Dans la paix des allées, l'été file

Et carresse d'un sourcil ses trésors

 

Les plaines vertes, les roches sombres

Et chaudes, les broussailles rousses

Leurs cent-mille facondes

Où s'émoussent tardifs des criquets gris

 

...

 

J'imagine métaphore

Roulant du dos, la bouche grande

Avalant, pieuse ou par monceaux

Les ondes torses de mes yeux

 

...

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
30 mai 2011 1 30 /05 /mai /2011 02:24

 

En l'État Impuissance règne en maître sur des monstres.

 

Flash.

 

Mes rêves sont des faxes. Mes rêves sont parfois glauques. Hier, un zombie paré à la Tim Burton, se déplaçant en ponts acrobatiques, c'est-à-dire en roulant sur son corps courbé en arrière telle une roue de lui-même, dans un décor tout aussi burtonesque, finissait par se planter face à moi. Il m'offrait pour me défendre, car son intention carnassière à mon égard ne faisait aucun doute, une fourchette sortie d'un service d'argent. Je refusais de frapper l'être qui se tenait devant moi. D'une part, réfractaire à l'idée de planter quoi que ce soit en qui que ce soit, je tenais l'arme, incrédule. Ensuite, même en rêve, j'imaginais aisément que la fourchette serait d'une inefficacité redoutable face au mort-vivant, et au mieux ne parviendrait qu'à aiguiser sa fureur.

Mais déjà, le zombie lançait les premiers crocs. Esquivant, je parai de mes avant bras, impuissante à éviter toutes les morsures. Des morceaux de chairs disparaissaient en bouchées saignantes, et, dépitée, je lançais les premiers coups de fourchettes. La jugulaire, les yeux ! Un coup fit vaciller le monstre qui avait encore apparence d'homme. Mais sitôt remis d'aplomb, la large entaille dégorgeant un flot de sang noir se rétractait, pour disparaître totalement.

Je me réveillai en sueur, les avant-bras qui n'étaient plus que des restes d'humérus brisés tenant encore à distance de mes parties vitales la gueule mortifère, relevés au-dessus de mon corps. Je me réveillai sur le dos, les genoux repliés sur mon thorax, les bras, sains et saufs, soulevant la couverture au-dessus de ma tête pour me protéger du monstre. Je me réveillai, le souffle court, le cœur frappant violemment à mes tympans, indécise. Le silence de l'appartement m'effrayait. Et si... quelque chose était entré chez moi... un zombie-roulette... un monstre...

 

Un monstre...

 

 

Il faut vous précisez que j'ai bien vingt-huit ans. Que je ne crois ni en Dieu, ni en Satan, ni en l'homéopathie, ni en le Grey. Que je me borne à apprivoiser simplement la masse d'informations que mon esprit cartésien tolère. Ni parano, ni complots, ni pandémies, ni drame écolo-social ne parviennent à se fixer durablement sur mon cortex.

Je suis passablement étanche à cet ensemble de phénomènes relevant de l'imagination mystico-collective qui s'emparent de la plupart de mes semblables.

Cela ne m'empêche pas d'apprécier un roman de SF à l'occasion.

Cela ne me pousse pas à profaner des lieux saints.

J'ai lu la Bible, autant que le Coran. J'ai dévoré Nietzsche, autant que j'ai savouré Voltaire.

 

Il faut vous préciser que mes origines sont sociales, avant d'être géographiques. La classe ouvrière blessée des années nonante a été mon terreau de culture. Je n'ai ni passé des heures sur un piano, ni poursuivi mes études, enthousiaste à suivre les traces d'un quelconque membre de ma famille, au-delà de la Maturité Professionnelle.

Mon milieu social actuel est inexistant. Ouvrière diplômée, l'état a tenté de me déclasser au grade de domestique, un léger handicap m'empêchant de poursuivre une carrière que, certes, je n'envisageais pas absolue, mais qui me permettait de vivre au-dessus du seuil de pauvreté.

Je fais partie de la masse qui représente le dixième de la population de mon pays : la masse pauvre.

Entre conduire et me nourrir, j'ai choisi de me nourrir.

Entre travailler à perte, et trouver une issue, j'ai trouvé une issue.

 

Mon esprit passablement raisonnable à fait fi de l'honorifique devoir social d'envisager un emploi comme clé structurante de mon organisme physique, mental et émotionnel.

Également, écarté la notion de véhicule privé symbole de liberté personnelle.

Mon organisme est étrangement demeuré intact à mes yeux, et je ne me sens entravée dans aucun de mes mouvements.

Le regard des autres m'indiffère.

 

D'une part, j'ai travaillé sur le rendu d'une façade qui me permette de vivre au-delà de la distinction rassurante que font les autres entre ce qui est normal et anormal. Je vis dans un appartement dont le bail est à mon nom, lumineux et entretenu. J'y invite des personnes proches, lumineuses et entretenues également.

Je ne participe plus aux manifestions alter-mondialistes de mes jeunes années. Ni ne participe plus aux beuveries collégiales que j'ai tant fréquenté durant la même période.

Je salue poliment les voisins qui me saluent, et ignore débonnairement les autres. J'ouvre ma porte, serviable, à ceux qui sont en rupture de denrées, et je rends la pareille à l'occasion.

J'héberge quelques bêtes adorables que je soigne et qui me le rendent à l'occasion.

D'une nature taciturne et solitaire, je m'adonne régulièrement à la lecture. Parfois, quelques lignes s'entrechoquent sur mon clavier.

 

Le monstre...

 

Ces dernières semaines, mes nuits se sont faites insistantes. Un voile s'est tissé entre moi et ce que j'absorbe du reste du monde. Mes pensées sont claires. Mon appréhension du reste est en mouvement. Il l'a toujours été. Mais jamais de façon aussi palpable, aussi prégnante. L'Impuissance m'était étrangère. Je la ressens dans ma chair. Je me sens l'âme d'un ballon de baudruche vidé de son air, pesant d'une pierre intégrée à sa masse. Je vois clairement l'étang qui accueillera bientôt ce corps-baudruche, sans pour autant être en mesure de l'écarter de ma route.

Je ne suis qu'ouvrière déclassée.

Je ressens Nietzsche suppliant qu'on le rende aveugle.

Quels sont ces mains qui m'entravent en me conduisant à la mort ?

Les miennes passées suffiraient-elles ?

Évidemment.

 

Vingt-huit années, c'est bien trop de temps pris pour parvenir à ce statu-quo que je maîtrise aujourd'hui. Débâcles diverses, débauches manifestes, révoltes guerrières, mon expérimentation ne s'est pas faite sans laisser, sur mon présent, de marques au fer rouge.

Bien sûr, le passé n'existe pas.... d'un certain point de vue. L'organisme émotionnel que je suis ne s'en préoccupe pas le moins du monde. Pour autant, il a forgé mon mental. Et clairement, entamé l'organisme physique que je suis.

Mais il n'existe pas.

Sauf dans les registres étatiques.

Où il est stipulé que je suis la mère célibataire d'une fillette de 5 ans.

 

Pieds et poings liés aux aléas éducatifs que cela suppose, j'ai composé pendant quelques années avec les soubresauts paternels de son géniteurs. Puis, il m'a fallu composer entre les exigences paternelles, toujours plus mesquines, les exigences scolaires, et les exigences propres à l'enfant. De mois en mois, la situation pouvait me résumer en grand écart entre quatre chaises, moi même recyclée en attente de traitement.

 

Quelques colères justifiées plus loin, je recevais une missive m'intimant à me présenter seule aux services sociaux.

Ensuite, il y eut la Gabegie.

Untel avait affirmé ceci, ceci fût repris en cela, sans évidement que la pseudo-professionnelle prenne le temps de contacter les professionnels de la santé engagés auprès de l'enfant.

L'éducatrice jointe, son témoignage fût détourné, remanié.
Au deuxième rendez-vous, je me posais clairement face à la dame, pour lui exprimer certains doutes quand à sa manière de procéder. Grave erreur. Je passais, dès lors que j'eus corrigé une partie de son rapport, signifiant que ni la psychiatre, ni l'éducatrice n'avaient pu tenir de tels propos, pour une mythomane. Termes repris dans le rapport : tendance à l’interprétation de Madame.

 

Bref. Avec une accusation de maltraitance par négligence sur la santé de l'enfant et un intitulé aussi révélateur, j'arrivais à l'audience avec le risque de perdre simplement la garde de l'enfant. Mon enfant. Celui que j'avais désiré, en dépit de la volonté du père à me faire abandonner cette idée. Celui que j'avais nourri. Soigné. Celui que j'avais donné au jour, que j'avais appris à connaître. Celui qu'il m'avait été donné de rencontrer. De rencontrer.

J'insiste sur le terme. Je ne me suis jamais sentie l'âme d'un guide. Je n'ai jamais estimé avoir besoin d'un cadre pour me supporter.

 

Je fais partie de cette race de parents qui dérange.

Qui entretient la curiosité naturelle de l'enfant, sans jamais brimer, rabaisser, humilier, pour une erreur de parcours.

Je ne parle jamais en terme de bêtises. L'enfant n'est pas un être bête.

Je n'ai jamais soutenu un contact hiérarchique avec l'enfant. Ni au-dessus, ni en-dessous. L'enfant est mon égal, et c'est dans ces conditions qu'il est le plus à même de définir ses besoins et de juger selon sa propre maturité.

Je me suis, lentement, dégagée des concepts archaïques qui font de l'enfant un être à former. Ayn Rand voyait en l'éducation, telle qu'on l'entend habituellement, une fabrique à monstre, en parallèle avec le commerce de monstre fait en Chine il y a quelques siècles de cela. Des nourrissons y étaient achetés ou prélevés dans des familles paysannes, et introduits dans des vases, dont on laissait uniquement sortir les pieds et la tête. Il s'ensuivait une déformation totale et permanente du corps. Le vase était brisé, et l'enfant, le monstre, vendu ensuite aux cours, où il était courant de posséder des troupeaux et des meutes d'animaux divers. Ces monstres devaient représenter le must du bétail de foire.

J'ai suivi les principes élémentaires du « parenting ». Le terme anglais marque d'absence la notion de soumission. On éduque son chien.

 

Si cela fait de moi une anarchiste, alors je suis anarchiste.

Je me doutais, évidemment, qu'aucune façade ne tiendrait assez longtemps pour moi et ma fille.

J'ai cherché à me bercer de cette illusion. Il me la fallait, pour vivre ces années sublimes.

 

Et puis, est venu le temps de me défendre. J'ai récupéré autant d'attestations et de certificats que je pouvais décemment récolter. J'en laissais certains de côté, de ceux qui n'auraient pas eu l'effet escompté durant l'audience. J'en faisais corriger d'autres par la main même qui avait fourni l'original, sans pour autant prendre le risque de passer pour une manipulatrice, une tare suffisant à ma peine. J'annotais des copies et des copies du rapport, marquant la moindre absurdité, relevant chaque contradiction, soulignant la plus petite marque de supériorité de l'assistante en charge du dossier. Je lissais le rendu. J'occultais des paragraphes entiers. Je déduisais de l'ensemble tout écart qui m'aurait fait passer pour une paranoïaque. Enfin, je relisais. Je m'imprégnais. La faille... il me fallait trouver la faille. Doctor es faille que je suis, je parvins à la dénicher trois jours avant l'audience. J'articulais ma défense.

Pas d'avocat.

Ma décision était prise dès le lancement de l'enquête.

 

La faille d'un système aussi complexe et puissant que celui qui s'abroge le droit de conduire la norme éducative et le devoir de définir les déviances et de les bannir, est dans sa puissance et sa complexité.

Assistants sociaux, éducateurs, experts, autant d'organismes étatiques qui œuvrent sur le même terrain, sans pourtant communiquer de façon transparente entre eux. Sous couvert d'une parfaite mécanique d'ensemble, il reste, entre les rouages, des zones de non-lieu.

Et c'est là que je décidais de placer ma pièce maîtresse.

 

J'avais en ma possession l'attestation émanent du directorat de l'établissement scolaire de l'enfant, qui stipulait que l'enseignante, interrogée, n'avait ni fait mention d'un absentéisme déraisonnable, ni jugé l'enfant en état d'épuisement chronique. Ce qui démentait, de peu, mais suffisamment, le rapport de l'assistante.

 

Je gardais tous les autres documents en réserve.

Lors de l'audience, je me retins à me déclarer contre les tenants et conclusions du rapport, puisque ce dernier n'avait été fait qu'en tenant compte des propos recueillis auprès de la famille paternelle de l'enfant, et que la seule professionnelle interrogée avait vu ses propos quelque peu interprétés à la rédaction finale. J'avançais vers la Juge, lui fournissant le document.

Je demandais dans un second temps une expertise psychiatrique familiale.

 

Garde alternée instaurée dans l'intervalle, j'avais quelques semaines pour fournir à l'expert les questions que je souhaitais lui soumettre. J'hésitais au départ. Et puis, sur la lancée, j'en fournis seize pages. Plus de deux-cents points d'interrogations. Articulés de façon à aider la personne, que j'espérais un tant soit peu raisonnable, à envisager le comportement du père comme étant nocif au développement de l'enfant, tout en rectifiant les termes du rapport, dans la limite des preuves que je pouvais fournir.

Je savais que je jouais avec le feu.

Ou nous sortions ma fille et moi de ce merdier, ou je risquais le pire. Un placement en famille d'accueil. Entre les deux, une succession de possibilités. Mise sous tutelle partielle de l'enfant et des rapports entretenus avec l'un ou l'autre des parents, retrait de garde, retrait d'autorité parentale, visites sous surveillance, éloignement temporaire, clause péril...

L'état possède de nombreuses possibilités d'actions afin de garantir à l'enfant un encadrement non-déviant.

 

Enfin, fût venu le temps de nous expertiser... non ! Marquée dès le départ du sceau de la déviance, il s'agissait, malgré le travail en amont que j'avais fourni, de m'expertiser, moi.  Évidemment ! Sans pouvoir désigner moi-même l'expert en charge, je me retrouvais devant un expert officiant au sein même de la machine.

L'expert. L'experte.

Comment l'expliquer ?

Ayn Rand (superbe dans "Return of de Primitive"), et plus aléatoirement, Garcia, dans « Mères sous influence », seront à même d'éclairer les lecteurs curieux de savoir quel genre d'étang m'attend...

 

Le monstre...

 

J'ai reçu une fourchette pour me battre contre un zombie.

Et le réveil semble désirer demeurer muet...

 

Bref.

En l'Etat, Impuissance règne en maître sur des monstres, et je dois planter ma fourchette ridicule dans la faille.

 

Compter sur la chance ? J'en suis pas là. J'ai beau voir l'étang narguer mon parcours, je respire bien. Et la sensation d'impuissance me quitte déjà.

 

 

... à suivre...->

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0