Iraenocte
31.05.2009
Citations Nuits des Lilas
Une plaine glissait en dunes solaires
Au sable naissant les graines de sel
Un homme arpentait les courants du temps
Quand sa peau baignait les vents du désert
Farouche silhouette et sombre tournure
Caravane céleste et pour un puits d'eau
Couvrait de son corps ses jambes légères
Les routes fantasques des cités de pierre
Frappant à leurs portes, le noble chercheur
Jetait de ses poches quelques pièces d'or
Ses besaces portaient les charmes éphémères
Richesses séchées des hydres de Sumer
Dans toute sa splendeur le noble pilleur
Portait la poussière des collines-mères
L'Euphrate arrimait les songes puissants
D'une main tissant les tables numéraires
Ses doigts caressaient les glyphes lunaires
Troublant d'un éclat le sang de la terre
Au mercure levant il filait dans l'air
Les flammes laiteuses d'une langue stellaire
Un tombeau enfin le cueille en son sein
Jouant d'une formule l'idole crépuscule
Comme An nous révèle l'unique requiem
La voix alchimique des dunes séculaires
Une nuit m'a pendu sur la toile, encore, encore l'écran qui me susurre-rejet-et dans le creux d'une oreille, tendue sur Dream On, Aerosmith déchaine mes souvenirs.
Il y avait sur l'étoile un vieux loup en partance. Et moi j'avais le choix. Je n'avais que le choix des armes, piqure éternelle, fallait-il le laisser s'en tirer à si bon compte, ou savate usée sur les babines ouvertes, prise d'air...
Je touchais les reflets d'un miroir brisé. La nuit suintait de part et d'autre de mon regard, qui se laissait aller aux souvenirs. Lui, le flanc couché d'amour, et moi, mouillée des rosées abdominales.
Vision cathodique plongeante, une gamine qui lève sa jupe tandis que le juke-box crépite sur Dream On. Aerosmith entraine les chaines barrées sur le torse, et les poings s'éclatent en papillons d'argent.
Les bécanes dehors somnolaient, et les cuirs portaient fièrement les cicatrices des dernières descentes.
Une nuit...
La nuit s'invite à ma couche, et la Lune est portée pâle. Une autre nuit frémit sur mon corps, je me souviens, Dream On, Aerosmith, mon ventre se plie, je me mets à fondre en rivières sombres, une nuit, Dream On, une nuit, Dream On...
Et l'orage échappait aux nuages, tandis que le ciel roulait sous les vents lourds de Mai. Il y avait dans ce ciel, en plus de Dream On, l'attente lourde et chaude de la tempête. Alors que la nuit déposait son absence sur la ville, que les stores baissés couvraient les éclats de la journée en rideaux étanches, les méandres tortueux de ma cervelle s'affairaient à repeindre en bleu les flash-lumière qui s'étalaient à chaque reprise métallique.
« Every time when I look in the mirror
All these lines and my face getting clearer
The past is gone, In the night, like dusk to dawn
Isn't that the way,
Everybody's got the dues in life to pay»
Et putain que l'orage manquait à mon ciel.
J'attendais la tempête, arrimant mon regard aux cimes célestes. Le bleu me prenait aux tripes, le bleu m'arrachait quelques mots, mais l'encre, elle, coulait rouge, sitôt absorbée par le flux mécanique de mes pensées.
Il y avait cette putain de nuit, collée à mes tempes, une poupée lâche roulée en boule, et la horde dessus, crachant et vociférant, les poings frappant encore et encore, et le bruit sec des os qui rencontrent l'acier, et l'air qui s'éclate en rosée magenta, les éclairs...
Les éclairs qui jetaient les ombres divines sur la scène, le traître mis-à-mort par la horde vengeresse.
Il y avait cette putain de nuit. Il y avait Dream On, Aerosmith, la gamine et sa jupe et le juke-box se répétait...
«I know nobody knows, where it comes and where it goes
I know everybody sin, You got the blues to know, Oh»
Il y avait le sang qui collait aux godasses, les chairs prisent dans l'asphalte, et la nuance mauve qu'avait pris le ciel. A cet instant, un des mecs à relevé la tête, les cheveux collés au front, dégoûtant de sueur et de flux corporels divers, le mec à relevé la tête en cherchant mon regard.
Dream On, Aerosmith...
«Half my life, is in those written pages,
Live and love from fools and, from sages
You know it's true, OH,
All the things you do come back to you
Sing with me, sing for the years
Sing for the laughter, sing for the tears
Sing with me, just for today
Maybe tomorrow, the good lord will take you away»
Le monde entier se met à frémir, et mon balcon n'échappe pas à la règle. L'électricité parcourt mon corps, parcourt la terre, et j'attends toujours la tempête.
Un blouson puant vient couvrir mes épaules, une main retient ma joue, et deux yeux perçant me clouent aux bras puissant du vieux loup. La meute, derrière, digère, et déjà les bécanes se mettent à vibrer de concert.
Les chaînes reprennent leur place, le monde se remet à tourner, et le juke-box crache encore.
La cathodique balance de la neige, j'attends l'orage, les nuages roulent à la frontière, et la nuit me soulève.
Aerosmith s'accroche à son rêve, et le monstre du loup nous emmène.
«Yeah, sing with me, sing for the year
sing for the laughter, sing for the tear
sing with me, just for today
Maybe tomorrow, the good Lord will take you away »
Dream On, Dream On, Dream On
Dream until your dreams come true
Dream On, Dream On, Dream On
Dream until your dreams come true
Dream On, Dream On, Dream On
Dream On, Dream On, Dream On
Dream On
Putain de ciel, putain de nuit, putain d'orage...
Putain de vie...
La nuit roulait le bitume aux quatres coins du pays. Les bandes déroulaient leur violence, écumant les bars et les villes. Les cuirs se montraient couverts de cicatrices, les lames, les ceinturons et les chaînes se couvraient d'or, se délectaient de sang.
Il y avait toujours quelque chose, ou quelqu'un, à se mettre sous la dent.
La nuit, Dream On, et le vent, qui se faisait insistant, les branches au-dessus de l'avenue, couchaient leurs ombres folles sur les bécanes rangées...
Une autre ville, un autre bar, un autre juke-box, une autre gamine, toujours la même, toujours la même jupe, toujours la même odeur, et l'air de la nuit qui s'étoilait de perles sanguines, le macadam qui résistait aux chairs un moment, avant d'accepter de les digérer...
Un ange avait couru dans les veines du Loup, et parfois, dans son regard, on pouvait deviner les étincelles légères, impuissantes à retenir la soif enragée qui avait enchaîné le corps et l'esprit aux goudrons charnels...
Il y eu une dernière nuit.
La nuit.
Dream On.
Regarde-toi, et souviens-toi... tout un chacun finit par payer son dû...
Il avait pris l'apparence d'une mioche, impertinemment claire. Il avait décoché dans les chairs du loup l'éclat viscère de la tendresse. La gamine arrimait ses bras délicats à son cou, et berçait la tempête d'un regard gelé...
Les mots et les coups s'égaraient au fronton de l'assurance qui se dégageait de cet être chétif. Elle n'était rien, rien qu'une gamine, rien qu'une larme d'innocence, et le Loup s'accrochait à son étoile, dans une valse sans contre-temps. Son autel, sa foi, sa tempête... Dream On trébuchait aux sursauts métalliques d'Aerosmith, et la nuit qui s'annonçait charnière et impitoyable, balançait ses premiers grondements dans l'air électrique de la ville.
« Sing with me, sing for the year
sing for the laughter, sing for the tear, sing with me,just for today
Maybe tomorrow, the good Lord will take you away
Sing with me, sing for the year
sing for the laughter, sing for the tear
Sing with me, just for today
Maybe tomorrow, the good Lord will take you away... »
Il y avait sur l'étoile un vieux loup en partance. Et moi j'avais le choix. Je n'avais que le choix des armes, piqure éternelle, fallait-il le laisser s'en tirer à si bon compte, ou savate usée sur les babines ouvertes, prise d'air...
Je touchais les reflets d'un miroir brisé. La nuit suintait de part et d'autre de mon regard, qui se laissait aller aux souvenirs. Lui, le flanc couché d'amour, et moi, mouillée des rosées abdominales.
Il y avait les nuages qui roulaient sous l'averse, un orage dément qui mouillait mes souvenirs...
Il y avait Dream On, un bar, un juke-box, Aerosmith, une gamine légère qui volait sous ses jupes les tendresses mortelles, un vieux loup qui partait en errance...
La nuit...
Dream On.
L'orage, enfin, prend la ville d'assaut.
Et la nuit reprend son cours...
21.05.2009