« Je me souviens jadis, les tentes ouvertes au vent,
Les voyages sans relâche, à couvrir les silences
D'or et de grandes broderies, aux mains de la clémence;
Je me souviens mon corps pétrir aux routes du temps. »
Elle se rappelle encore les ressacs douloureux
Quand la tempête prise aux remparts écorchés
Arrache parfois les brides d'un songe délicieux
Qui se brise incertain à son ciel, à ses pieds
Comme des milliers de bouches à courir sa pitance
Sa chair, suie d'hirondelle, c'est le printemps qui danse
A chercher des ouies à chaque nouvelle comète
C'est la jonquille tremblante sous l'été qui s'entête
« Je me souviens, demain, le soleil franc boudeur
Les toiles enlevées aux morts, le couvent de ma chance
Qui relèvent, assassins, les mots que j'ai fraudeurs
Et qui ressassent, vains, de vaines intransigeances. »
Elle avait ses deux mains et les regards fugueurs
Quand elle chantait douleur à chacun des quatrains
D'autres tombaient l'aubaine à son jeté joueur
Quand elle trompait son coeur à son verbe incertain
Elle n'avait pour seul nom celui qui bien la trouve
Dans le reflet candide des larmes que sont la pluie
Des larmes qui ne sont doigts dans le dos d'une louve
Elle souvenait, limpide, liberté n'est que suie
« Je traçais mes grandeurs en de lettres trop nobles
Sur des chemins de tout, à force de n'être rien
Mais de quelle insistance, j'y tranchais mon vignoble
Demain je souviendrai que jamais n'y fut biens. »
Elle soufflera la lie d'un souvenir trop lisse
Au-delà d'un aubole, n'est toujours qu'en-deça
A gravir quelques cimes, à perdre les abysses
Elle se faisait humaine un peu plus à chaque pas.
Lola
08.04.10
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